D'après
l'enregistrement
"
Mesdames, Messieurs, Monsieur le Maire et chers collègues,
A entendre
la longue présentation du budget comme en kinoparama par
les adjoints, on voit bien le caractère quelque peu
exceptionnel de cette séance qui suit de peu les
élections municipales. Ce budget est celui d'une politique
que nous n'approuvons pas et, sauf à refaire une campagne
qui vient d'avoir lieu, je ne reviendrai pas sur l'ensemble
détaillé des éléments qui viennent d'être ainsi
évoqués. Mais à entendre les adjoints comme Bruno REMOND, je
me demandais comment Cachan, notre ville, pouvait-elle
manifester autant d’énergie, avoir autant d’atouts par
la qualité des établissements qui y résident, par la
multiple proximité de carrefours d’échange comme
Rungis, Paris, Orly, être aussi bien desservie et au final
avoir d'aussi peu de rayonnement ?
Yves Évariste
en présentant les aspects du développement économique en
faisant la confession en creux en disant "nous allons
nous y atteler" !
Je me suis
souvent posé cette question en rendant des visites à des
amis élus de multiples communes, comparant leurs problèmes
aux nôtres. Je suppose qu’il est arrivé à chacun
d’entre vous, une fois éloigné de nos repères
territoriaux habituels de regarder notre ville, laquelle
est finalement redevenue le village qu’elle était à
l’échelle de la banlieue actuelle, avec tendresse et même
amour comme on regarde aussi la France avec recul
lorsqu’on voyage à l’étranger.
Avec
amour et pour tout dire une certaine irritation !
Car, au
delà des fausses réponses qu'on trouve dans le document
budgétaire et qui chaque année nous sont servies de
manière récurrente, le manque de terrain,
l’insuffisance de l’assiette fiscale, la jeunesse de
notre administration – j’en oublie certainement -, si
la réponse est si difficile à identifier, c’est
finalement qu’elle est simple : Cachan ne sait
pas où elle va.
Le
budget qui nous est aujourd’hui proposé est à l’image
de ce constat : il est presque parfait, mais il est
sans âme.
Je dis
presque parfait parce que je ne suis pas certain que la
technique qui consiste à emprunter l'équivalent des
subventions qui ne nous sont pas encore consenties pour les
investissements ne constituent pas une façon détournée
de retirer au Conseil municipal son pouvoir de décider de
faire ou pas en cas de refus qu'elles soient accordées.
Mais enfin, acceptons l'augure ! On emprunte 29 MF pour une dépense
prévue de 14 MF. L'année précédente c'était déjà
29MF pour une dépense réelle de 14 MF. On verra si
l'engagement est tenu en fin de parcours.
Donc
budget parfait techniquement, juridiquement, oui surtout
juridiquement (!), parfait même sur le plan de la
technique fiscale. Je crois même, je suis certain,
d’avoir été le premier dans l’opposition, à la
grande surprise de Monsieur ROUY, à avoir reconnu et même
approuvé l’inflexion donnée en vue d’apurer
progressivement la dette, qui reste malgré tout importante
à un peu plus de 9000 francs par habitant, au moment même
où le représentant de DNV qui a pourtant entre-temps
rejoint la majorité plurielle continuait de s’en inquiéter
avec gravité. Le Maire et Bruno REMOND qui n’est jamais
avare d’un compliment allaient même jusqu’à lancer :
« Pourquoi n’allez-vous pas jusqu’à le voter ? ».
Mais
c’est justement qu’entre l’acte budgétaire et
l’acte politique, il y a un grand fossé.
Individu,
entreprise, pays ou ville : nul ne peut durablement
survivre s’il ne s’appuie sur des valeurs et n’est
animé par une certaine vision de notre avenir, une
ambition à réaliser ou même un rêve à accomplir.
Peu
importe même qu’on parvienne pas exactement là où
l’on voulait aller. A tout le moins on parcours ensemble
le chemin. C’est cet horizon commun qui
permet de classer les aspirations, de choisir entre
les projets, d’ordonner les priorités, d’engager
efficacement l’action et de n’être ni freiné par les
inévitables contradictions ni d’être submergé par le
technicisme face aux tout
aussi inévitables difficultés.
Tel
est malheureusement depuis quelques années le cas de
Cachan qui avance, bien sûr, le contraire serait grave,
mais en se contentant de courir sur l’erre des projets
anciens, en parant au plus pressé et en naviguant au mieux
sans réelle ambition pour Cachan et donc sans véritable
suite dans les idées.
C'est
dommage car Cachan est mieux prédisposée que d’autres
à la donne actuelle dans laquelle la formation, la création
et la communication jouent un rôle prépondérant. Et
cependant j’ai le sentiment que nous ne saisissons pas
pleinement nos chances.
C’est d'ailleurs d’une certaine façon ce que je
retire de cette campagne électorale qui, pour bien
des raisons, nous laisse sur notre fin: Cachan n’est pas
une ville médiocre qui se réfugie
dans la facilité, Cachan est plutôt un territoire
incertain.
Incertain
en raison de se finitude géographique, de son passé non
digéré et surtout incertain car laissé orphelin d’une
véritable ambition que pour l’instant on ne risque pas
de retrouver dans la communauté d’agglomération qu’on
lui désigne pourtant comme le berceau de son futur.
Certes
Cachan n’a pas que des atouts. Elle a quelques tares
presque congénitales qu’elle traîne comme un boulet :
- Le
fait d’avoir conçu le centre-ville face au centre
supposé, l’Hôtel de Ville, qui n’est le centre que
la tête des élus mais pas de la population ;
- Le
fait d’avoir des enclaves qui avec près du tiers des
179 ha de la ville hache menu sa cohésion territoriale
et sociale.
Rien
de tout cela ne serait fatal si la politique menée en corrigeait
les effets.
Or ce
n'est pas le cas, au contraire.
Ainsi,
au fur et à mesure que la ZAC Desmoulins avance, on prend
conscience qu’elle amplifiera le problème au lieu de
l’atténuer, que son urbanisme vieillira mal, peut-être
même plus vite que celui de la initiale ZAC. DNV a clamé
pendant la campagne qu’elle rejoignait la gauche
plurielle parce qu’une pause allait être marquée de
manière à réorienter l’ensemble du projet. Cette réorientation,
à défaut qu’elle soit une pause, est nécessaire. Plus
le temps passe, moins elle sera efficace. J’ai cru
comprendre qu’il n’y aura en définitive pas de réorientation,
pas de remodelage du futur de cette ZAC mais une simple
reprise technique de souffle. Il est vrai qu’on a bâti
à toute allure. Je vous pose donc la question, Monsieur le
Maire, car elle est déterminante pour l'équilibre
budgétaire des futurs exercices.
Le
grand dessein nécessaire au remembrement du cœur de ville
et à l’unité de la cité avec ses différents quartiers :
je ne le vois pas dans ce secteur.
Pas
plus que je ne vois, deuxième interrogation, une claire
volonté de désenclaver et de viabiliser au sens moderne
du terme le quartier Cousté pour réinstaller dans cette réserve
foncière les activités qui manquent à la ville. Ces
activités sont nécessaires non pas seulement pour
apporter de la taxe professionnelle puisque celle-ci part
à la communauté urbaine encore que la nature et la
profusion des projets dits d’intérêt communautaire dépendent
évidemment de l’apport de chacun même si cela n’est
pas écrit du moins tant que cette communauté ne sera pas
une véritable communauté territoriale. Elles sont aussi nécessaires
pour empêcher Cachan de devenir une ville dortoir d’où
fuient commerces et dynamisme dans la journée.
Toute
surface doit être protégée dans ce secteur. Or ce qui
n’est pas le cas comme en témoigne la construction
d’immeubles d’habitation à la place d’anciens entrepôts.
Cette zone ne peut supporter la mixité habitat – activités
telle qu'elle est actuellement organisée comme
l’illustre malheureusement le premier centre et le
Leclerc qui comprime cette zone au pied du Coteau et
l’empêche de respirer. Tout projet de promenade,
d’habitations ou d’infrastructures de service ne fera
qu’amplifier les problèmes.
On
aurait pu transférer dans la ZAC une part des activités
mais on voit qu’on construit sans que les activités
suivent le même rythme. Le budget n'est qu'un instantané
de votre politique. Quelle est-elle pour ce quartier ?
Quant
aux autres projets, entre la politique du coup par coup
actuelle et les projets certes pharaoniques de votre prédécesseur,
par exemple celui concernant la RN 20, une juste milieu
s’impose mieux adapté aux besoins de l’urbanisme
citoyen et territorial actuel.
Nous
n’allons pas refaire la campagne électorale. Elle vient
d’avoir lieu et c’est à vous que les Cachanais ont
confié pour six le soin de leur destin.
Vous
appliquez votre programme et d’une certaine façon
c’est normal.
D’ailleurs
permettez-moi de féliciter votre administration pour le
travail technique qu’elle a réalisé pour préparer ce
budget, travail dont je néglige pas le fait, Monsieur le
Maire, qu’il a été entrepris sous votre direction et a
bénéficié de la compétence de Bruno REMOND.
De
fait, si notre groupe ne votera pas ce budget qui ne
correspond pas à la politique que nous voulons pour Cachan
car on ne vote pas sur la qualité technique du travail,
nous voterons en revanche vos propositions en matière de
taux.
Je
n’épilogue pas. Nous entrons dans une période économique
plus troublée où l’on risque de compte plus souvent les
moins que les plus par rapport aux prévisions et nous agréons
totalement votre volonté de garantir un pacte de stabilité
fiscale étale dans le temps. Nous nous y étions engagés
nous-mêmes pendant la campagne électorale et je ne vois
pas pourquoi nous vous suivrions pas sur ce terrain tant
que les impôts n'augmentent pas ou plus.
Certes,
ils demeurent trop élevés. Nous
regrettons par exemple que vous ne proposez pas d’aligner
Cachan sur la grande majorité des communes du Val de Marne
qui accordent une exonération de la taxe foncière pour
les deux premières années. Sachant que la taxe
d’habitation des logements neufs est sensiblement plus élevée
que celle supportée par les logements plus anciens,
les nouveaux arrivants, notamment grâce aux
programmes d'accession à la propriété, ont à réaliser
des efforts difficiles, des efforts souvent trop difficiles.
Avant
de conclure, je voudrais dire qu'enfin nous avons bien noté
votre souci d’adapter Cachan au souci du terrain et de la
proximité.
Noble
intention si vous ne tombez pas dans les pièges que
recouvrent ces termes brutalement venus à la mode après
les Municipales où la réaction contre le partis institués
a connu un comble, notamment à Cachan, réaction qui de
certains cotés n’a rien pour moi de rassurant sur le
partage citoyen de la démocratie car les partis sont
nécessaires à l'idée de responsabilité.
Quant
à la proximité, le Maire doit écouter. Certes. Il doit
être courtois avec chacun, dois-je ajouter y compris avec
moi-même !
Le Maire, J-Y
LEBOUILLONEC : C'est sous ce signe que j'ai
placé cette séance. Je suppose que cela ne vous a pas
échappé, Monsieur HERNU ?
Patrice HERNU
"
C'est peut-être effectivement le début d'une nouvelle
ère. J'en prends acte. Mais pour en revenir à l'idée de
la proximité, quand les riverains refusent un terrain de
street ball, faut-il qu’il s’exécute ? J’en
suis moins certain. L’élu ne doit pas se priver de sa
capacité anticipatrice, de décider la construction
d’une salle de sports en dépit de l’hostilité de
certains groupes de pression (Où en d'ailleurs est le
projet du gymnase Paul Bert) ?
Je crains
fort que la proximité qu’on nous vante ne soit souvent
qu’un habillage élégant du clientélisme électoral.
Une façon de s’approprier tous les rouages associatifs
et de service sous le prétexte qu’ils doivent être au
plus près des citoyens ce qui n’est souvent qu’une façon
de porter au plus près du citoyen l’expression politique
du pouvoir, parfois même sous couvert d’apolitisme. Je
ne vous citerai pas tous les noms de ces élus de proximité,
de gauche comme de droite, que ce clientèle habile fait réélire
malgré les casseroles – la fameuse prime à la casserole
– ce qui pour ma part me fait plutôt douter de la santé
de la démocratie.
Je ne
voudrais revenir sur l’usage qui a été fait des rouages
de la ville pendant la campagne.
Je trouve cela anormal et j’ai d’ailleurs déposé
plainte. J’ai été débouté par le Procureur ce qui ne
m’empêche pas de continuer de penser que ces pratiques
sont anormales.
Cette
conception de la proximité finit par éliminer du dialogue
terminal avec la population toute opposition au nom de la nécessité
du consensus. Elle
décourage les oppositions nécessaires comme à Valenton
ou dans ces communes où
à force d’asphyxie les listes d’opposition doivent
passer des annonces pour trouver des candidats ! Ce n'est
à l'honneur de personne. Surtout elles habituent les équipes
en place à l’idée que la ville leur appartient.
Vous
me direz : « Vous exagérez Monsieur HERNU:
nous en sommes loin à Cachan. »
Pas si sûr
Monsieur le Maire. Le mal s’installe parfois par des détails
qu’on accepte comme normaux alors qu’ils ne le sont
pas.
C'est le
cas par exemple quand on utilise le logo de la Ville pour
remercier les électeurs sur un panneau électoral. Détail
insignifiant me direz vous. Je trouve qu’il en dit long
sur le risque que court Cachan.
Brouhaha
divers... Approbation dans le public
Toutefois,
même sur ce point, en début de mandature, je suis prêt
à vous faire crédit.
A vous,
pour les six ans à venir, de nous montrer Monsieur le
Maire, notamment lorsque seront mis en place les conseils
de quartier, que vous saurez nous éviter cette dérive.
Patrice
HERNU
|